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18/08/2009

Souffrance au travail...

Le suicide au travail est le plus souvent lié à une transformation de l'organisation. Mardi 11 août, un agent de France Télécom à Besançon (Doubs) s'est donné la mort. Sud-PTT indique que, "depuis février 2008, c'est le vingtième suicide enregistré" chez l'opérateur par l'Observatoire du stress et des mobilités forcées, créé par ce syndicat et la CGC.

Ce passage à l'acte est "en lien avec le travail", affirment les syndicats. Le parquet de Besançon a, lui, estimé que, à la lecture d'une lettre laissée par le salarié, il était "impossible d'établir un lien formel de causalité" entre ses problèmes professionnels et son suicide, sans exclure la possibilité d'une enquête sur ses conditions de travail.

Ce drame relance le débat sur le malaise au travail. Coauteur, avec Florence Bègue, de Suicide et travail, que faire ?, à paraître le 2 septembre aux Presses universitaires de France (PUF), Christophe Dejours, titulaire de la chaire psychanalyse-santé-travail au Conservatoire national des arts et métiers (CNAM), souligne l'importance de l'organisation du travail.

Comment réagissez-vous à ce nouveau cas de suicide ?

Je suis en colère, car cet événement souligne une dégradation du "vivre ensemble" chez France Télécom qui, depuis sa privatisation, pratique une réorganisation d'une grande brutalité, d'après les enquêtes dont j'ai eu connaissance. Je suis effondré, car cela montre que le travail que nous avons essayé de faire, depuis les premiers suicides au travail, il y a une douzaine d'années, pour favoriser la prise de conscience de la souffrance au travail, est sans effet.

Avez-vous rencontré des chefs d'entreprise ouverts à ce sujet ?

Oui, mais ils sont rares, car les directions sont très hostiles à ouvrir ce dossier. J'observe toutefois, depuis quelques années, qu'elles sont très inquiètes, et prennent des initiatives simplistes, comme la création de cellules psychologiques, de numéros verts ou l'organisation de stages de gestion individuelle du stress. Ce ne sont pas de réelles solutions, parce que les suicides relèvent de fragilités individuelles, même si l'entreprise reconnaît l'existence de contraintes. Chacun est considéré comme responsable de sa décompensation. Cette vision est fausse : ces suicides sont le plus souvent en lien avec les transformations de l'organisation du travail.

Les fragilités individuelles ne pèsent donc pas ?

Chacun a ses fragilités. Il faut cesser de penser l'organisation du travail pour des êtres humains idéaux qui n'existent pas. C'est vrai qu'en général, le salarié qui se suicide a des difficultés personnelles. Mais expliquer ainsi son geste, comme le font les directions, c'est s'appuyer sur l'idée d'une coupure entre vie personnelle et vie au travail. Or, sur le plan psychique, elle n'existe pas. Quand quelqu'un souffre au travail, cela vient dégrader sa vie personnelle.

La crise économique aggrave-t-elle le risque de suicides ?

Nous n'avons pas de statistiques, mais la crise ne suffit pas à aggraver ce risque. Ce qui joue, c'est l'absence de remise en question d'une organisation du travail qui produit 300 à 400 suicides par an et une montée des pathologies mentales.

Que préconisez-vous ?

Il y a trente ou quarante ans, le harcèlement, les injustices existaient, mais il n'y avait pas de suicides au travail. Leur apparition est liée à la déstructuration des solidarités entre les salariés. Celles-ci ont été broyées par l'évaluation individuelle des performances, qui crée de la concurrence entre les gens, de la haine même. Cette évaluation doit être remise en question, et je connais des entreprises qui le font. Il faut se réinterroger sur ce qu'est le travail collectif, la coopération. Cette dernière passe par l'instauration de règles de métier, qui organisent le "vivre ensemble".

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